« Les États-Unis d’Amérique ont entraîné le monde dans l’ère du protectionnisme judiciaire. Alors que la règle de droit a, de tout temps, servi d’instrument de régulation, elle est devenue aujourd’hui une arme de destruction dans la guerre économique que mènent les États-Unis contre le reste du monde, y compris contre leurs alliés traditionnels en Europe. »
Cette citation issue du rapport, “Rétablir la souveraineté de la France et de l’Europe et protéger nos entreprises des lois et mesures à portée extraterritoriale” (2019), préparée à la demande de l’ancien premier ministre Edouard Philippe illustre pleinement la conséquence néfaste sur la souveraineté économique Française et Européenne de l’extraterritorialité de la jurisprudence américaine. Dans le cadre de cette note nous allons nous pencher sur une loi en particulier, Foreign Corrupt Practices Act, également connue sous le diminutif FCPA.
La mondialisation des marchés, des flux de personnes, et l’extension des moyens de communication ont favorisé un développement économique considérable, à bien des égards très bénéfique pour la population de la planète. Néanmoins cette mondialisation de l’économie a été accompagnée de l’augmentation de la criminalité internationale et son infiltration dans l’économie licite. Les grandes entreprises multinationales sont régulièrement liées à des affaires de corruption, de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme et du crime organisé. Les États-Unis ont très tôt mis en place une stratégie politico-judiciaire pour contrer cette évolution et défendre le commerce international ainsi que leurs propres intérêts nationaux. Puis, ils ont pris soin d’étendre le périmètre d’application de leurs lois en renforçant sa portée extraterritoriale. Cela implique que toute entreprise désirant avoir accès au marché américain et commercer en dollars doit se soumettre aux lois américaines et coopérer avec le Department of Justice (DoJ).
Le FCPA est une loi américaine votée en 1977 dont l’objectif est de lutter contre la corruption internationale. Plus précisément, elle a pour ambition de combattre la corruption d’agents publics à l’étranger dans le cadre de transactions commerciales, d’obtention de parts de marché ou d’influence de politiques gouvernementales. En 1998 la loi a été modifiée pour s’appliquer aux entreprises et aux personnes étrangères qui, directement ou indirectement, contribuent à effectuer des paiements corrompus sur le territoire américain et non plus seulement à l’étranger.
Un grand nombre d’entreprises européennes, asiatiques et américaines ont été contraintes de payer des amendes dans le cadre du FCPA comme HSBC, Lloyds, Deutsche Bank, Telia etc. L’utilisation de cette loi soulève la question de l’impérialisme économique américain et d’atteinte à la souveraineté des nations. En effet, un nombre croissant de voix critiques accusent Washington, sous couvert du FCPA, de mener une véritable guerre économique à l’encontre de ses propres alliés. Une guerre économique dont l’unique objectif est d’affaiblir la concurrence au profit des entreprises de l’Oncle Sam. Ainsi, ce rapport a pour objectif de répondre aux questions suivantes : En quoi le FCPA est une atteinte à la souveraineté économique française et européenne? Quels mécanismes de réciprocité sont nécessaires pour contrer le FCPA ?
Dans un premier temps nous allons étudier l’origine du FCPA et son principe d’extraterritorialité. Puis, dans un second temps nous allons nous pencher sur la mise en application de la loi et les critiques qu’elle suscite. Nous terminerons ce rapport par proposer une série de mesures à adopter pour défendre les intérêts français et européens.
Par Sean SCULL et Marine AUDINETTE, Analystes du Millénaire.
Sous la direction de Pierre Clairé, Directeur adjoint des Etudes du Millénaire
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Crédit photo : American flag, gavel of a judge and statuette of Themis Goddess of justice, Jernej Furman, sous license Flick Attribution 2.0 Generic (CC BY 2.0)
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