Les Députés de la Commission des finances ont renforcé “l’exit tax” ce jeudi 17 octobre, un impôt créé pour freiner le départ de contribuables à l’étranger. Seulement, comme souvent, notre créativité fiscale va être contreproductive. En créant un Mur de Berlin fiscal, c’est à dire qu’en voulant créer un mur fiscal pour empêcher les contribuables de partir, on ne va qu’alimenter ce souhait.
Plus de Français fuient la France
Malheureusement, la France devient de plus en plus un pays que l’on quitte. Ceux qui partent sont surtout les plus jeunes actifs et les plus aisés. Lorsque l’ISF existait encore, on observait, selon un rapport du Sénat1, que les départs concernaient des redevables plus jeunes et disposant d’un patrimoine plus important. Ce phénomène risque de s’amplifier puisque selon OpinionWay2, 54% des 18-25 ans pourraient rejoindre les 2,5 millions de Français vivant à l’étranger3.
Des Français fuient notre pays car il n’offre pas assez de possibilités et n’encourage pas la réussite. En cause les mêmes maux français : un salaire net plus faible et une fiscalité confiscatoire qui ne récompensent pas suffisamment les efforts. Or, avec la mondialisation et l’internationalisation des entreprises et des universités, le départ est facilité. On cherche donc à taxer des contribuables qui partent parce qu’ils estiment être trop taxés.
Exit tax, une mesure inefficace
L’exit tax marque le génie français en matière fiscale. Ce dispositif fiscal vise à imposer les plus-values latentes (non réalisées) lorsque des contribuables transfèrent leur résidence fiscale hors de France quand bien même leurs revenus ne sont pas réalisés en France ! Cela s’applique si la plus-value est réalisée dans un délai de 2 ans après le départ.
Cependant, l’exit tax est inefficace. Mise en œuvre en 2011, elle n’a pas empêché les départs. En 2012, 251 Français aux revenus annuels supérieurs à 300 000 euros étaient partis. Ce chiffre a explosé en 2013 avec 659 départs4. En revanche, lorsque Emmanuel Macron, dans le cadre de sa politique fiscale attractive, diminue le délai de taxation de la plus-value à 2 ans (contre 15 ans auparavant), les grands contribuables restent : -30% de déclarations d’exit tax en 2017.
Un Mur de Berlin fiscal
Plus on matraque les personnes, plus elles partent. En effet, selon un rapport du Sénat, sur la période 2012-2016, nous perdons en moyenne 597 foyers fiscaux par an, contre 315 sur la période 2007-2011, soit un quasi-doublement5. La volonté de renforcer l’exit tax associée à un matraquage fiscal des grands contribuables et entreprises ne fera qu’accélérer la tendance observée sous les années Hollande.
La passion de certains de taxer ceux qui réussissent pour les faire rester n’a d’égal que celle des dirigeants soviétiques lors de la Guerre Froide. Pour empêcher leur population de partir, ils ont préféré construire un mur plutôt que de se demander pourquoi les gens partent. Au contraire, ils ont donné aux Est-Allemands encore plus l’envie de partir après 1961.
Le Mur de Berlin était paradoxalement devenu un symbole de liberté et l’Exit tax pourrait prendre le même chemin en motivant les contribuables à partir. Ces derniers peuvent interpréter le renforcement de cette taxe comme un refus des législateurs de s’interroger sur pourquoi ils partent et d’apporter des réformes structurelles pour répondre aux maux français.
William Thay, Président du Think-tank Le Millénaire et spécialisé en politiques publiques.
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