William Thay « Macron : quel acte II pour la suite du quinquennat ? »

À peine un an après sa réélection, Emmanuel Macron doit déjà imposer un acte II pour éviter le risque d’immobilisme. Ainsi, le Chef de l’État dispose de deux choix : reprendre la main avec un projet de réforme dans le cadre d’une coalition ou apaiser la société avec des projets consensuels.

La promulgation de la réforme des retraites est une victoire à la Pyrrhus pour Emmanuel Macron. Elle permet au chef de l’État de marquer son second mandat d’une réforme marquante mais au prix d’une grande partie de son capital politique. À peine un an après sa réélection, le Chef de l’État semble en mauvaise posture mais il dispose tout de même de moyens d’action pour dessiner les contours d’un acte II.

Une situation politique bloquée 

La situation politique est difficile pour le parti présidentiel depuis la réélection d’Emmanuel Macron. En effet, les dernières élections législatives ont installé un Hyper-Parlement face à un Hyper-Président, en ne conférant au camp présidentiel qu’une majorité relative. Nous sommes ainsi dans un régime politique oscillant entre la IVème République et le régime présidentiel américain où le président doit composer avec le Congrès pour gouverner.

Si le parti présidentiel semble en mauvaise posture, il n’y a pour l’instant aucune alternative politique majoritaire, ce qui réduit l’intérêt d’une consultation populaire. Le duo exécutif a perdu une grande partie de son capital politique depuis les élections de 2022 avec une perte importante de leur niveau de popularité. De plus, les sondages d’intention de votes en cas de dissolution montrent certes une baisse des intentions de vote en faveur de Renaissance et ses alliés mais aucun autre parti n’arriverait à obtenir la majorité absolue. 

La France est bloquée parce qu’il existe des majorités de blocage, mais aucune majorité alternative pour proposer une initiative ou un cap. Cette situation crée une situation de blocage puisque si une majorité de Français n’est plus en phase avec le Gouvernement, il est fort probable qu’une majorité de Français soit insatisfait en cas d’absence de Gouvernement dans un scénario connu notamment par la Belgique. 

100 jours pour choisir un cap

Emmanuel Macron a profité de sa dernière allocution pour tourner la page de la séquence de la réforme des retraites. Les fameux « 100 jours » doivent permettre d’avancer sur trois projets (travail, justice et progrès) mais surtout faire un point sur les possibilités réelles d’un acte II pour la suite du quinquennat. Ce temps doit permettre d’identifier l’état du pays dans les rues afin de savoir si les manifestations continuent à s’organiser, de quelle façon, à quelle fréquence, et à quelle ampleur ? De plus, ce délai doit permettre de décanter la situation politique afin de savoir s’il existe une possibilité d’élargissement afin de constituer une majorité absolue à l’Assemblée nationale.

Le Président de la République est ainsi à la croisée des chemins, avec une hostilité renforcée par l’opposition à la réforme des retraites. Il dispose de deux grandes options : soit adopter une posture de père de la nation qui chercherait à gouverner en créant du consensus soit conserver son ADN politique en cherchant une majorité pour mener des réformes structurelles et répondre davantage aux maux français. Sur la première option, il s’agit essentiellement d’étendre ces 100 jours jusqu’à la fin du quinquennat. C’est-à-dire qu’Emmanuel Macron devrait choisir un Premier ministre avec une certaine habileté politique mais sans ambition présidentielle. Ainsi, les réformes doivent être des projets consensuels pour éviter la politisation des débats au Parlement avec des groupes politiques qui s’opposeraient en posture.

Sur la seconde option, le président de la République doit davantage revenir à son logiciel politique du premier tour de l’élection présidentielle 2022. La coalition NUPES, regroupant la France Insoumise (LFI), EELV, le Parti Communiste et le Parti socialiste, semble suivre la stratégie de la LFI avec une stratégie d’opposition radicale à Emmanuel Macron. Il ne reste plus que les Républicains qui n’ont pas montré une grande fiabilité lors de la réforme des retraites. Cela suppose de poser un véritable contrat de coalition comme en Allemagne, afin de poser un projet législatif clair sur à titre d’illustration : le redressement économique, le pouvoir d’achat, les dépenses publiques, les questions régaliennes autour de la sécurité, de la justice et de la régulation des flux migratoires. Cela nécessite une triple révolution : de culture politique, d’Emmanuel Macron contre lui-même et son camp, et des Républicains qui accepteraient de qu’avait Jacques Chirac avec Valérie Giscard d’Estaing entre 1974 et 1976. 

Si la situation politique est difficile pour Emmanuel Macron, il maitrise pour l’instant l’agenda dans la mesure où il n’y a pas d’alternatives politiques majoritaires. Pour autant, le président de la République risque l’immobilisme s’il ne choisit pas un cap qui peut se résumer de la façon suivante : devenir Gerhard Schröder et être celui qui sauvera la France comme l’homme malade de l’Europe ou plutôt adopter le consensus pour s’approcher davantage du second mandat de Jacques Chirac.

William Thay, président du Millénaire

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