Pour paraphraser le président de la République, dans the Economist en novembre 2019 qui affirmait que « L’OTAN est en état de mort cérébrale », nous pourrions affirmer que l’Organisation mondiale du commerce (OMC) est en état de mort cérébral.
La création de l’OMC le 1er janvier 1995 vise à réorganiser le commerce international sur de nouvelles bases après la défaite du modèle communiste en 1991. L’accélération de la mondialisation à partir des années 1980, la chute de l’Union Soviétique et l’essor des économies est-asiatiques ouvrent la perspective d’intégrer de nouvelles économies aux institutions du libre- échange pour assoir la domination du néolibéralisme. Ainsi, à partir de la fin des années 1980, un consensus au sein de l’Occident émerge pour moderniser les accords du GATT signés en 1947. D’une part, la globalisation entraîne l’augmentation significative du nombre d’échanges de services non couverts par les accords du GATT. D’autre part, les accords du GATT étaient jugés défaillants dans certains secteurs comme le secteur agricole où les mesures protectionnistes tarifaires et non tarifaires demeuraient encore importantes.
L’OMC a soutenu l’essor du commerce international au début du XXIème siècle, notamment à partir de l’adhésion de la Chine « l’atelier du monde » en 2001 qui provoque un tournant. Entre 1980 et 2021, le commerce international a été multiplié par 7,4 alors que le PIB mondial a été multiplié par 3,9. Les pays du monde se sont échangés plus de biens qu’ils n’en ont produits. Cette donnée est à l’origine d’un basculement des rapports de force économiques entre les pays, mais aussi avec les acteurs privés de grande envergure qui sont au cœur des échanges.
Les États-Unis ont soutenu la croissance du commerce international puisqu’ils le dominaient. Pourtant, les États-Unis ont modifié leur approche face aux crises et à la contestation de leur hégémonie par la Chine. Ainsi, l’ « America first » Trump de 2016 illustré par la guerre commerciale contre la Chine, poursuivie par Joe Biden avec l’Inflation Reduction Act (IRA), replace les intérêts des Américains au cœur de leur stratégie. Si celle-ci est payante à l’intérieur de leurs frontières, elle est une menace pour le commerce international et pour les intérêts européens et français.
Si Ursula Van der Leyen craint un conflit commercial avec la Chine et les États-Unis, elle fait fi de constater que celui-ci existe déjà. Face à la reprise chinoise, les États-Unis ont repris l’initiative commerciale et contraignent l’Europe à la réaction. L’Union européenne a certes annoncé assouplir les aides d’État aux industries du secteur des énergies renouvelables et du développement durable. Pour autant, d’une part, ces assouplissements temporaires concernent un périmètre d’acteurs restreint qui de surcroît ne sont pas les plus menacés par la loi IRA. D’autre part, ils ne sont pas assortis de financements suffisants pour contrer la menace que fait peser l’IRA.
Pendant que les ruptures technologiques industrielles à venir font l’objet d’une bataille commerciale et économique féroce entre les acteurs, l’Union européenne regarde ailleurs. Pourtant, les États-Unis se sont employés à défendre leur industrie face à la Chine quitte à sacrifier leur allié européen. La nouvelle ère commerciale qui s’ouvre implique pour les Français et les Européens de bâtir un cadre commercial favorable. D’une part, il doit reposer sur le soutien aux acteurs économiques. D’autre part, il faudra se projeter sur les ruptures industrielles et technologiques qui généreront des excédents commerciaux durables dans un commerce international dépourvu d’organe international crédible pour l’encadrer.
Par William Thay, président du Millénaire
Matthieu Hocque, Secrétaire général adjoint
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Crédit photo : Joe Biden par Gage Skidmore sous licence CC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons
Emmanuel Macron par Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, sous licence « domaine public »
Ursula Von der Leyen par Parlement européen, sous licence CC BY 4.0 © European Union 2019 – Source: EP
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