Alors que la SNCF était un fleuron industriel qui ne craignait pas de conquérir le monde par ses innovations (électrifier une ligne ou le TGV dans les années 1970-1980), elle est désormais terrorisée à l’idée de faire face à l’ouverture à la concurrence européenne. Au lieu de retarder le couperet inéluctable, faisons de la SNCF une entreprise compétitive et exportatrice de haute technologie.
Une entreprise rendue anachronique
La « nationalisation de la SNCF » de 1982 porte un péché originel. En transformant la SNCF d’une société d’économie mixte en EPIC, l’État s’est rendu propriétaire de 100% des capitaux de la société. Cette décision est à contre-courant de l’histoire. Alors que le monde entier se transforme et devient plus compétitif, la SNCF se retrouve en situation de monopole avec un cumul d’avantages sociaux financés par l’État. Près de 20% du chiffre d’affaires de la SNCF est absorbé par les acquis sociaux ou le coût de la dette. Cette situation n’incite au changement, ni les dirigeants qui préservent le monopole, ni les responsables syndicaux qui préservent les acquis sociaux.
La SNCF a accumulé des retards d’investissement à tous les niveaux. Sur le plan des infrastructures, la rénovation et la modernisation des petites lignes nécessite selon la Cour des Comptes 6,4 Mds € entre 2020 et 2028 alors que SNCF Réseau y consacre 400 M€ par an, soit la moitié des besoins ! Sur le plan technologique et environnemental, les premiers trains à hydrogène ont été mis en circulation en France en 2023 alors qu’ils circulent depuis 2018 en Allemagne.
Sans incitation au changement, la qualité de service public diminue. D’une part, les défaillances du réseau engendrent un coût en termes de retards chiffré par la SNCF en 2018 à 2 milliards de minutes perdues pour tous les usagers. D’autre part, le manque d’investissement menace de fermeture 40 % des petites lignes, soit 5 600 km de voies ferrées, selon une étude de l’UFC-Que Choisir de 2021, amplifiant la désertification des services publics dans les territoires périphériques.
Pour une nouvelle vision de la SNCF au XXIème siècle
En accumulant les boulets, nous sommes terrorisés à l’idée de laisser la SNCF affronter la concurrence européenne. Nous devons réformer la SNCF pour la rendre compétitive en allégeant ses coûts. Il faut supprimer les privilèges salariaux déraisonnés qui expliquent à eux seuls 30% de la perte de compétitivité en 2024 si l’on additionne l’écart moyen de salaire de 550€/mois favorable aux cheminots, les régimes spéciaux de retraite et de sécurité sociale, les frais de transport, les généreuses NAO ou encore l’accord de cessation anticipée d’activité acquis grâce aux grèves.
Grâce aux marges de manœuvre financières récupérées, la SNCF pourra exporter de la technologie de pointe et conquérir le monde. Nous pourrions investir dans de nouveaux trains plus performants et plus durables sur les grandes lignes, mais aussi dans de nouvelles technologies liées à l’optimisation du trafic comme des capteurs connectés, des systèmes d’analyse prédictive ou encore dans l’IA pour l’aiguillage grâce au savoir-faire de nos ingénieurs.
La SCNF gagnera de l’argent et pourra financer sa mission originelle : assurer un service public de proximité et aménager le territoire national. Les classes populaires et moyennes de la France rurale et de la France périphérique pourront enfin pouvoir bénéficier des bienfaits des mobilités vertes.
William Thay, Président du think-tank Le Millénaire
Matthieu Hocque, Directeur adjoint des Etudes du Millénaire, spécialiste des politiques publiques
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Crédit Photo : TGV RAME 817, par patrick janicek via Flickr sous Licence CC BY 2.0.
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