Vers un printemps Arabe à l’africaine ? Une redéfinition des relations entre la France et les pays africains

La France doit partir”, le message inscrit des pancartes en soutien au coup d’État militaire que vient de subir le Niger fin juillet 2023 illustre le profond ressentiment des populations locales envers Paris.

Après, le Mali et le Burkina Faso, le Niger est le dernier pays en liste à avoir vu son gouvernement civil renversé au profit d’une autorité militaire. Le renversement du président démocratiquement élu Mohammed Bazoum marque un revers pour les Occidentaux et plus particulièrement la France. Paris avait fait du Niger après avoir été chassé du Mali et du Burkina Faso, le pilier de sa nouvelle stratégie au Sahel. Le pays compte plus de 1 500 militaires français sur son sol et accueille également des contingents occidentaux qui l’épaulent dans sa lutte contre le terrorisme.

La rhétorique anti-occidentale et plus particulièrement anti-française avec les accusations de néocolonialisme, d’ingérence française ou d’incompétence des gouvernements précédents ayant noué des partenariats avec les Occidentaux dans leur capacité à assurer la sécurité du pays, sont des thématiques récurrentes dans les discours de la junte nigérienne afin de légitimer son pouvoir. Pour autant, la présence d’un ressentiment envers l’ancienne métropole qui anime les populations locales des ex-colonies françaises n’est pas nouveau. Il convient dès lors de comprendre les raisons qui ont poussé à l’émergence de ce sentiment afin de mettre en œuvre de nouvelles solutions politiques pour que la France puisse continuer à exercer une certaine influence sur ce qui a été son pré carré depuis plus d’un demi-siècle.

Ensuite il s’agit de réaliser que l’Afrique a bien changé depuis les indépendances et la fin de la Guerre Froide et c’est principalement parce qu’elle ne l’a pas vu (ou n’a pas voulu le voir) que la France se retrouve dans une situation complexe en Afrique. Alors que nos alliés nous laissaient une totale liberté en Afrique durant la guerre froide, ce qui pouvait s’apparenter à une rente néocoloniale, ce n’est pas le cas aujourd’hui et l’Afrique attise les convoitises d’un grand nombre de puissances. L’Afrique s’est mondialisée et est rentrée dans la modernité. Les putschistes n’ont aussi plus aucun mal à trouver des partenaires qui leurs conviennent et qui sont prêts à leur offrir davantage. De plus l’information joue désormais un rôle primordial et c’est parce qu’ils n’ont pas pris l’entière mesure de celle-ci que les Français perdent pied en Afrique au profit d’autres pays bien moins regardant sur les Droits de l’Homme ou l’éthique.

Enfin il faut se questionner sur ce que seront les conséquences pour la France sur le long terme. Même s’il est inconcevable de devoir quitter le continent tant son importance est grande et va encore grandir, cela ne signifie pas que nous devons continuer dans le sens qui est le nôtre et que nous ne devons pas nous remettre en cause. Les récents évènements montrent bien que notre logiciel africain est périmé et qu’il est urgent d’en changer. Nous devons impérativement nous remettre en cause et repenser nos relations avec l’Afrique. Faute de cela nous risquons de nous faire chasser d’Afrique par d’autres puissances mais aussi par nos partenaires et alliés qui nous verrons comme gênants. Bien plus que la présence et le rayonnement futur de la France en Afrique c’est notre place en tant que puissance globale qui est ici en jeu.

Par Thibault ARONDEL, Analyste du Millénaire. 

Sous la direction de Pierre Clairé, Directeur adjoint des Etudes du Millénaire

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Crédit photo : Paul Kagame, Africa-France Summit 2017 in Mali | Bamako , 14 January 2017, via Flickr.

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