Le 5 novembre 2025, l’ouverture d’une boutique éphémère SHEIN au BHV Marais a attiré plus de 50 000 personnes en quelques jours. Cette affaire dit tout des maux français : on étouffe nos producteurs, on refuse de changer de modèle… et on s’émeut ensuite des conséquences que nous avons nous-mêmes créées.
Le « Made in chez soi » est à la mode à l’étranger
D’un côté, les Etats-Unis soutiennent massivement leurs producteurs industriels via l’Inflation Reduction Act (IRA). Un dispositif qui subventionne l’offre comme la demande, sans condition de nationalité, mais avec une condition claire : produire sur le sol américain. Résultat : la production industrielle aux Etats-Unis a augmenté de 0,9% en glissement annuel sur la période janvier-août 2025[1]. Même des groupes français, comme Stellantis ou Schneider Electric, trouvent intérêt à investir outre-Atlantique plutôt qu’en France !
De l’autre côté, la Chine n’a jamais relâché la pression malgré les difficultés post-Covid. Ses dispositifs protectionnistes restent intacts voire sont amplifiés avec le dernier plan quinquennal 2025-2030 annoncé en octobre 2025[2]. Hautes-technologies, batteries, panneaux solaires, automobiles électriques, industrie de la santé, tous les producteurs du monde entier sont incités à produire en Chine[3]. Le pays prétendument « en difficulté » voit sa production industrielle bondir de 6,1% sur la période janvier-octobre 2025[4]. Une recette simple similaire à la doctrine américaine : produire chez soi, embaucher chez soi et consommer chez soi.
Alors que le « Made in France » n’est pas à la mode chez nous
En France, le mantra est inverse : produire à l’étranger, embaucher depuis l’étranger et consommer des produits étrangers, non pas à cause de Pékin ou de Washington, mais à cause de notre modèle.
Premièrement, la France est un enfer fiscal. Selon l’index de compétitivité fiscale de la Tax Foundation, elle est le pire pays de l’OCDE en termes de compétitivité fiscale (45,8 points)[5] avec deux points faibles. D’abord, le record du niveau de taxes sur les entreprises à hauteur de 36,13% du revenu net[6], mais aussi le cumul des taxes sur ceux qui créent de la richesse (prélèvements distincts sur les successions, les actifs bancaires, les transactions financières, sans compter l’impôt sur la fortune immobilière). Pour peu de résultats sur les recettes fiscales, puisque selon Bercy, 8 prélèvements obligatoires sur les près de 400 que compte la France, concentrent environ 80% des recettes fiscales[7]. Tout cela érode les marges, freine l’investissement, limite la croissance.
De plus, nos producteurs paient un impôt de papier : l’empilement de normes conséquence d’une passion pour la régulation. Depuis 2002, les entreprises doivent composer avec des codes qui ont explosé en volume : le code de l’environnement (+ 689 %), du commerce (+ 365 %), de la consommation (+ 333 %) ou du travail (+ 224 %)[8]. C’est le résultat d’un État mal-géré avec un enchevêtrement d’agences, de collectivités ou d’autres organismes producteurs de normes qui imposent aux producteurs en France des obligations qui ne s’appliquent pas aux produits importés !
Mais le pire demeure l’état d’esprit dans lequel le pays est plongé depuis 1981 et l’élection de François Mitterrand. Depuis, la réussite économique est suspecte, l’entreprise est coupable, le producteur est présumé profiteur et spolieur par essence. Ceux qui fuient sont qualifiés de « traîtres », mais ceux qui restent pourtant conspués… laissant la place à des acteurs comme SHEIN qui ne souffrent pas du carcan imposé à nos propres fabricants.
La France ne perd pas la bataille industrielle faute de moyens. Elle la perd parce qu’elle handicape ceux qui veulent produire ici, et subventionne indirectement ceux qui produisent ailleurs. L’affaire SHEIN n’est que le symptôme, la maladie en revanche, est française.
William Thay, chroniqueur économique, président du think-tank gaulliste et indépendant Le Millénaire
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Crédit Photo : Salon Shein w Galerii Młociny w Warszawie, de DMCGN, via Wikimedia Commons sous licence CC BY-SA 4.0.

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