Vers une crise financière similaire à celle de 2008 ?

La crise de 2008 est encore dans tous les esprits. Par sa brutalité ainsi que par sa durée, elle a marqué l’économie internationale en plongeant le monde occidental dans un continuum de crises économiques que les décideurs publics n’arrivent pas à enrayer. Ainsi, la crise de 2008 pourrait être revu a posteriori comme un élément marquant la fin du cycle néolibéral ouvert par Margaret Thatcher et Ronald Reagan dans les années 80.

Dès lors qu’une banque américaine importante fait faillite, la comparaison avec l’emblématique faillite de Lehman Brothers en septembre 2008 est toute trouvée, ce qui a été le cas pour la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) en mars 2023. Depuis mars 2023, le secteur bancaire doit affronter sa pire crise depuis septembre 2008. Le 28 avril 2023, une nouvelle banque américaine, First Republic, a fait faillite. La valeur de la banque a été divisée par 30 en un seul trimestre, avec une valorisation boursière de 20 milliards d’euros début 2023 à 654 millions le vendredi 28 avril.

Cette nouvelle faillite soulève deux craintes pour l’avenir bancaire mondial. D’une part, la crise bancaire de mars 2023 n’est pas juste la résultante d’un effet de panique bancaire localisé dans le temps et dans le secteur spéculatif des nouvelles technologies comme les cryptomonnaies. D’autre part, nous vivons peut-être non pas le mois de septembre 2008, mais plutôt le mois de septembre 2007 avec la faillite moins connue de la Nothern Bank au Royaume-Uni que les autorités monétaires avaient sous-estimées à l’époque. A quoi ressemble la crise bancaire de 2023 ? Finalement, comme en 2007, le pire est peut-être devant nous.

La crise bancaire de 2023 présente davantage de similarités avec la crise bancaire de 2008 qu’elle ne présente de divergences.

Elle puise ses racines dans l’hyper optimisme des investisseurs sur les innovations de rupture. Le secteur immobilier comme actif refuge est soumis à des risques endogènes très importants comme en 2008 avec une forte tension spéculative. Les marchés financiers sont moins paniqués mais créent toujours des produits financiers complexes que les banques ne maîtrisent pas totalement. Les États-Unis présentent un niveau d’endettement public comme privé qui ne tient que sur leur politique internationale dans un contexte géopolitique toujours plus incertain. Il n’y a jamais eu autant d’inégalités sur la planète avec la succession de crises qu’a connu le début du XXIème siècle (crise financière de 2008, crise des dettes souveraines 2010-2012, crise énergétique avec la guerre en Ukraine).

Les règlementations bancaires permettent pour l’instant d’éviter un scénario d’effondrement total « sur le modèle de 2008 ». L’Europe dispose d’une protection solide pour l’instant et d’une Banque centrale crédible. En revanche, de nouveaux risques sont apparus tels que la gestion d’emprunt à long terme sur des taux très faibles (entre 0,5% et 1,5%). Une banque européenne, particulière certes, a déjà fait faillite, donc le système bancaire n’est pas totalement protégé.

De surcroît, l’Europe n’est pas protégée de risques économiques exogènes plus larges : la perte de crédibilité économique américaine qui ne surmonte pas son endettement public comme privé ainsi qu’un basculement de la crise bancaire mondiale en crise des dettes souveraines dans les pays du Sud avec toutes les conséquences économiques, politiques et migratoires que l’on a déjà pu connaître dans les années 1980 et 1990.

Par Matthieu Hocque, Directeur adjoint des Études du Millénaire. 
William Thay, Président du Millénaire

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Crédit photo : Locaux de Lehman Brothers avant la faillite via Wikimedia Commons sous licence CC BY-SA 3.0
Locaux de Lehman Brothers via Flickr sous licence CC BY 2.0

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