Retraites : quelle réforme est nécessaire ?

« On ne peut pas exiger de l’Etat d’être seul face au défi gigantesque qui consiste à faire de l’économie française une économie de production. » Lors de son discours au Congrès de Versailles en 2009, le président Nicolas Sarkozy esquissait déjà les contours du partage de l’effort entre l’Etat, les entreprises, les corporations et les citoyens pour redresser notre pays. En ce sens, Nicolas Sarkozy introduit la réforme des retraites décalant le départ à la retraite de 60 ans à 62 ans avec comme ligne directrice le partage de l’effort. Si le système des retraites est aujourd’hui excédentaire, nous le devons grandement à la réforme Sarkozy-Woerth de 2011.

Il reste une semaine pour le Gouvernement pour faire passer son projet de réforme qui a déclenché les passions, avec plusieurs séries de manifestation de la France du travail, nourries par une colère populaire. Rejetée par plus de deux tiers des Français, la réforme des retraites a fait l’objet d’un blocage des syndicats, pourtant en perte de vitesse dans la société. Nous avons vu que certains corps de métiers privilégiés par le système de retraites réussir à mobiliser leur base contre le projet. Cela s’explique pour trois raisons. Tout d’abord, le Gouvernement a polarisé son projet de réforme des retraites sur la question de l’âge de départ, principale source de conflits, bien que comme l’affirme le président du MEDEF Geoffroy Roux de Bézieux celle-ci ne demeure qu’une “partie de l’équation”, puisque de nombreux autres sujets devront être négociés avec les partenaires sociaux tels que l’emploi des seniors, les régimes spéciaux, les critères de pénibilité, etc. Ensuite, le Gouvernement a fait le choix de ne pas utiliser un amendement au dernier PLFSS pour sa mesure paramétrique. Cette situation l’a rendu dépendante de la position des Républicains et de son nouveau chef Eric Ciotti alors même que la droite républicaine est confrontée à un dilemme lié au glissement sociologique de son électorat davantage rural et populaire qu’il y a une décennie, ce qu’a tenté d’incarner Aurélien Pradié. Enfin, le Gouvernement a commis des imprécisions sur les carrières longues, l’emploi des seniors ou encore les 1 200€ de minimas de retraites. Cette situation a participé à une perte de crédibilité technique sur une réforme que les Français avaient bien compris (85% des Français qui contestaient la réforme savaient exactement pour quelles raisons). De même, la NUPES a pourri les débats pour que la contestation de l’intersyndicale puisse gagner du temps et mettre en difficulté un Gouvernement qui joue son quinquennat sur les 6 prochains mois, en souhaitant faire de la réforme des retraites un marqueur pour répondre à tout procès d’immobilisme.  

Avec 813 milliards d’euros, soit 35% du PIB, la France figure ainsi parmi les champions du monde en matière de dépenses sociales, véritable trappe à dépenses publiques. Dans son dernier rapport d’octobre 2022, la Cour des comptes affirme que la situation des comptes sociaux nécessite un impératif redressement. En effet, les finances publiques de notre pays devront faire face à de multiples enjeux de dépenses légitimes tels que des investissements massifs sur l’industrie, l’innovation ou encore la transition énergétique et écologique pour soutenir la croissance économique de demain. De surcroît, l’écart des dépenses sociales entre la France et l’Allemagne s’est creusé lors de la crise sanitaire, accentuant le retard de la France dans les années à venir pour financer son modèle social et ses investissements futurs. Face à ces impératifs, la réforme des retraites paramétrique peut permettre de réaliser une partie des économies nécessaires. En revanche, elle ne peut pas constituer la seule ligne directrice d’un projet visant à redresser la France. En l’état, il s’agirait d’un projet injuste qui laisse de côté la France du travail au profit des corporations qui captent la richesse nationale. Pour ne plus être l’homme malade de l’Europe, la France doit renverser la logique de son modèle productif et de son modèle social.

Par Matthieu Hocque SGA du Millénaire, et Julian Castel analyste du Millénaire,

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Crédit Photo : Ingénieur sénior, par Andrea Piacquadio sous Licence Libre, via Pexels

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