Le 22 septembre, Emmanuel Macron annoncera la reconnaissance d’un État palestinien par la France devant l’Assemblée générale des Nations Unies à New York. Cette décision au timing très discutable a été perçue comme la provocation de trop par Tel Aviv. N’excluant pas de manière claire le Hamas de tout rôle dans le futur État palestinien, l’annonce du Président a été vécue comme une véritable trahison par Israël doublée d’une récompense accordée aux terroristes du Hamas et à toutes les factions armées ayant participé aux atrocités du 7 octobre.
Si cette lecture demeure injuste à l’encontre du chef de l’État, il est toutefois possible de tirer parti de cette erreur diplomatique majeure en conditionnant la création de l’État de Palestine au respect de conditions qui satisferont Israël. Cela passera notamment par la constitution d’un tribunal de Nuremberg pour juger le Hamas comme le furent les nazis après la Shoah.
Résoudre le conflit israélo-palestinien répond à un double impératif moral
Premier impératif moral, l’Occident et la France en particulier doivent accompagner le deuil d’Israël. Le 7 octobre 2023 a donné lieu aux plus grands crimes contre l’humanité subis par le peuple Juif depuis la Seconde guerre mondiale avec près 1 100 Israéliens victimes de la barbarie du Hamas. Cela emporte deux conséquences pour la paix : d’une part, la restitution par le Hamas de tous les otages morts ou vivants encore captifs à Gaza, et d’autre part, que le le Hamas tout comme les autres groupes armés palestiniens ayant participé aux attaques terroristes du 7 octobre 2023 comme le Jihad islamique palestinien ne pourront en aucun cas continuer à gouverner ni même à participer à la vie du futur État palestinien.
Second impératif moral, les Palestiniens ont également le droit à la sécurité, première des libertés. Cette garantie ne pourra être assurée que par un État. Or, si les dirigeants palestiniens ont continuellement refusé la création d’un État de Palestine depuis 1947, ils le doivent désormais à leur population. Plus le temps s’écoule, plus cette perspective s’éloigne. Ainsi, la fin de la guerre avec le Hamas pourrait bien être la dernière chance palestinienne d’avoir un État. En d’autres termes, pour les Palestiniens, la question se pose ainsi : c’est soit « un État a minima » respectant une série de conditions édictées par Israël, soit « pas d’État ».
Un tribunal de Nuremberg pour assurer la transition
Le tribunal de Nuremberg a été essentiel pour structurer la paix en Allemagne d’après-guerre. En effet, après 1945, les 12 procès de Nuremberg permettent de juger plus de 180 hauts dignitaires des crimes nazis. De plus, ils s’accompagnent ensuite d’une dénazification de la population allemande avec plus de 5 000 condamnations prononcées dans les années suivantes. Ces procès ont été nécessaires pour apporter réparation aux victimes des horreurs de la Seconde guerre mondiale, mais aussi pour purger l’intérieur de l’appareil d’État et de la société allemande embrigadée par 12 ans de nazisme.
Le Hamas et ses alliés des autres factions terroristes palestiniennes répondent aux deux objectifs fixés au Tribunal de Nuremberg. D’un côté, leurs actions entrent pleinement dans le périmètre du tribunal de Nuremberg, à savoir des crimes contre l’humanité. En effet, la barbarie observée lors du le festival de Réïm ne peut être qualifiée autrement du point de vue du droit international. De l’autre côté, le Hamas gère de facto avec sa branche armée et sa branche politique la bande de Gaza depuis 2006. Cela leur a laissé le temps d’embrigader à travers leur politique éducative la population de Gaza aboutissant au même impératif qu’en Allemagne post-1945 : la dénazification. Ainsi, de tels procès organisés en Israël permettront de juger à la fois les dignitaires mais tous les militants, adhérents et soutiens du Hamas.
Un État de Palestine à des conditions satisfaisantes pour Israël
Obtenir l’accord d’Israël ne sera possible que si la ligne rouge sécuritaire fixée par Tel Aviv est respectée. En d’autres termes, un futur État palestinien ne devra en aucune façon être en mesure de constituer une menace pour l’État hébreu. Ce futur État sera donc démilitarisé ; ce qui ne signifie pas pour autant qu’il sera sans défense. La sécurité de la population palestinienne sera en partie assurée par une opération de maintien de la paix sur le modèle de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL). Cette force se chargera de la surveillance des frontières quand la tâche d’assurer la sécurité de la population incombera à une coalition réunissant les États-Unis ainsi que l’ensemble des pays arabes ayant accepté de normaliser leurs relations avec Israël dans le cadre de l’extension des Accords d’Abraham.
Les crimes du 7 octobre sont imprescriptibles. Les dirigeants et membres du Hamas (y compris de sa branche politique) et des autres factions terroristes devront être écartés de tout rôle, quel qu’il soit, dans la vie du futur État palestinien et bannis. En plus d’un cadre juridique similaire à celui du procès de Nuremberg, Israël aura mandat pour traquer sans relâche partout dans le monde tous les dirigeants, mais aussi tous les militants et soutiens du Hamas et des autres factions terroristes palestiniennes à Gaza ou en Cisjordanie ayant eu un rôle dans les différentes attaques terroristes que l’État hébreu a subi depuis plusieurs décennies. L’enjeu est de garantir à Israël qu’il n’y aura aucune impunité aux crimes passés comme avec le procès Eichmann.
Un plan qui ne répondrait pas aux exigences sécuritaires légitimes d’Israël serait condamné à rester une simple déclaration d’intention. La prise de position du Président de la République souffre certes de maladresses, mais elle pourrait toutefois permettre d’aboutir à une paix durable. Une paix qui ne doit pas être présentée comme une récompense octroyée aux terroristes du Hamas mais plutôt comme un moyen de mettre fin aux souffrances des populations palestiniennes et israéliennes. Conditionner l’État de Palestine à un tribunal de Nuremberg permettra d’organiser l’exil, le jugement et la traque des responsables et militants du Hamas, mais aussi de lancer un impératif pour Israël : la « déhamassisation » des populations palestiniennes.
Matthieu Hocque, Directeur adjoint des Etudes du Millénaire, co-auteur de la note « Comment créer un État de Palestine ? »
Edouard Chaplaut-Maestracci, Analyste international au Millénaire et co-auteur de la note « Comment créer un État de Palestine ? »
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