Le 24 avril prochain, Emmanuel Macron pourrait une nouvelle fois être élu par défaut. Affrontant encore Marine Le Pen et n’ayant pas véritablement mené de campagne de premier tour en raison de la crise internationale, Emmanuel Macron aborderait son second mandat sans avoir présenté de projet aux Français. Cette situation conduirait à un manque de légitimité et interroge le sens donné à ce second mandat.
Lors du premier tour de la présidentielle , plus de 50 % des suffrages ont été exprimés en faveur de projets politiques diamétralement opposés à celui du président de la République. Ce constat montre les limites d’un second mandat qui serait conduit uniquement sur les bases et en faveur d’une partie très réduite de la population. Ce résultat en forme de désaveux impose non seulement des changements sur la forme, mais aussi une réinvention en profondeur . C’est la réinvention promise par Emmanuel Macron le 14 juillet 2020, mais qui n’a jamais eu lieu et que les Français attendent.
Une réinvention nécessaire
Sans celle-ci, Emmanuel Macron risque de se retrouver à la tête d’un Etat ingouvernable. L’élection lui aura apporté une légitimité de titre pour cinq années supplémentaires, mais une absence de légitimité d’action. Ce manque de capital politique ne permettrait pas à Emmanuel Macron de mener la moindre réforme structurelle. Le risque serait alors de vivre un quinquennat de Gilets jaunes , où la France serait incapable de se transformer pour répondre aux nouveaux défis auxquels elle doit faire face.
Car si la réinvention est nécessaire pour Emmanuel Macron sur le plan interne pour pouvoir gouverner, elle l’est tout autant sur le plan international. En effet, la crise sanitaire et la guerre en Ukraine ont accéléré les mutations du XXIe siècle et imposent une nouvelle grille de lecture des relations internationales. De même, les revers au Liban puis dans le cadre du contrat des sous-marins ont montré que la doctrine macroniste originelle de quête du consensus est devenue obsolète. Emmanuel Macron doit désormais changer de logiciel idéologique pour adopter une approche pragmatique des rapports de force qui gouvernent le monde.
Devenir le Gerhard Schröder français ?
Face aux nouveaux défis que la France devra affronter, Emmanuel Macron doit donc se renouveler en adoptant un projet de puissance et de grandeur. L’enjeu est de doter la France des outils nécessaires pour continuer d’être une flamme dans le monde et de peser de tout son poids dans les bras de fer qui définiront la marche du monde. Pour cela, le premier impératif est de refaire de la France un pays prospère capable de devenir la première puissance économique européenne.
Pour mener cette transformation, Emmanuel Macron gagnerait à se forger une image de grand réformateur en s’inspirant de Gerhard Schröder. En effet, alors qu’au début des années 2000, l’Allemagne était considérée comme ‘l’homme malade de l’Europe’ et comptait 5 millions de chômeurs, Gerhard Schröder mène les réformes Hartz et transforme son pays en locomotive de l’économie européenne. Dès 2008, l’Allemagne ne compte plus que 3 millions de chômeurs.
L’exemple allemand
Ces fameuses réformes Hartz ont porté sur la refonte du régime de droits et devoirs des demandeurs d’emploi par la formation et le reclassement (Hartz I, 2003), sur la création facilitée d’entreprises par les chômeurs (Hartz II, 2003), sur la décentralisation de la négociation salariale et du service public de l’emploi (Hartz III, 2004) ainsi que sur la rationalisation de l’assistance chômage (Hartz IV, 2005 – jugée la plus efficace).
Elles ont donné un avantage comparatif aux acteurs économiques allemands face à la concurrence internationale. En 5 ans, les exportations allemandes sont ainsi passées de 33 % à 44 % du PIB et, en moins d’une décennie, elles ont même doublé grâce à la compétitivité de ses champions industriels.
Réformes structurelles
Ces lois Hartz sont en phase avec l’esprit de réforme du macronisme de 2017 et ont certainement inspiré l’action du Président de la République, notamment sur la réforme de l’assurance chômage. Or, si les réformes Hartz ont su lever les verrous de l’économie allemande, le quinquennat Macron apparaît lui inachevé au regard de sa volonté initiale de libérer les énergies.
Pour devenir le Gerhard Schröder français, il ne s’agit pas seulement pour Emmanuel Macron d’imiter les réformes du chancelier Schröder, mais aussi de mettre en oeuvre les réformes structurelles capables d’adapter la France aux nouveaux impératifs de l’ère économique et géopolitique qui s’ouvre. Pour devenir le leader de l’Europe, Emmanuel Macron n’a pas d’autre choix que de faire de la France la première puissance économique, militaire et diplomatique de l’Union européenne.
Par Emeric Guisset, Secrétaire-Général-Adjoint du Millénaire et Matthieu Hocque, analyste du Millénaire
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Crédit photo : Emmanuel Macron par Пресс-служба Президента Российской Федерации sous licence CC BY 4.0
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