William Thay et Marie Vidal dans Le Point : « Commémorer Napoléon pour célébrer la grandeur française »

TRIBUNE. Alors que le bicentenaire de la mort de l’Empereur approche, la polémique sur la commémoration de cet événement fait polémique.

 

 

Le débat portant sur la commémoration de Napoléon Bonaparte est révélateur de notre époque. Il s’agit pour les partisans de la cancel culture de juger l’ancien empereur des Français avec une lecture contemporaine plutôt que par rapport à son apport à la construction du pays. Le président de la République ne peut plus se résoudre à appliquer sa politique du « en même temps », il est ainsi à la croisée des chemins. Il doit en effet trancher entre deux visions de la France : celle des déconstructeurs qui veulent réécrire notre histoire et celle de la France éternelle.

La prise d’otage par la cancel culture

La cancel culture, corollaire de la postmodernité, vise à réécrire l’histoire pour en tirer uniquement une interprétation contemporaine. Il s’agit ainsi de supprimer toute référence historique qui entrerait en contradiction avec l’idéologie dominante de notre époque. La cancel culture est ainsi en contradiction complète avec le travail d’historien qui consiste à analyser l’histoire dans un contexte historique déterminé. Le jugement d’un personnage historique du XIXsiècle à partir d’un mode de pensée actuel est totalement anachronique et participe à la politisation de l’histoire. Dans une société en perte de repères depuis le désenchantement du monde, nous aurions besoin, au contraire, de partager une destinée et une tradition héritée de notre pays millénaire.

Les partisans de cette logique souhaitent ainsi effacer Napoléon Bonaparte de notre histoire. L’effacement de l’histoire, une dérive propre aux régimes totalitaires, ne privilégie ainsi pas le débat en ostracisant Napoléon Bonaparte. Ils visent ainsi à réduire l’héritage napoléonien à l’unique rétablissement de l’esclavage pour, d’une part, délégitimer son action et, d’autre part, utiliser un totem rendant tout débat impossible auprès d’une partie de la population. L’objectif étant d’orienter le débat sur l’esclavage comme crime contre l’humanité plutôt que d’apprécier la globalité de l’œuvre napoléonienne pour en évaluer son apport dans l’histoire de France.

Pour Macron, la France est-elle encore grande ?

Le président de la République est à la croisée des chemins. Soit il poursuit sa mue progressiste, à l’instar des démocrates aux États-Unis, en donnant une légitimité aux partisans de la cancel culture, soit il est l’héritier d’une longue tradition d’un pays millénaire. Ce choix sera à la fois primordial dans l’héritage qu’il laissera mais également dans une logique plus politique à près d’un an de la prochaine échéance présidentielle. En choisissant sa droite ou sa gauche, il sera difficile pour lui de pratiquer la politique du « en même temps » étant donné la polarité de ce débat. Ainsi, une cérémonie d’un personnage illustrant la grandeur française ne saurait être faite a minima.

Le débat sur la commémoration de l’ancien empereur revient pour Emmanuel Macron à choisir entre deux visions de la France. Il peut acter définitivement le déclassement de la France comme puissance moyenne ou, au contraire, lui permettre un sursaut pour qu’elle rayonne certes différemment mais reste attachée à la notion de grandeur. Il ne s’agit pas pour le président de la République de faire revivre les épopées napoléoniennes, mais de démontrer que la France est habitée par la force de l’esprit de Napoléon Bonaparte. Ainsi, en nous en donnant les moyens et si nous adoptons un certain état d’esprit, nous pouvons rendre sa grandeur à la France même lorsque le pays traverse les pires difficultés.

Napoléon, un modèle à suivre ?

Grâce à des Napoléon Bonaparte, la France a en effet toujours été au rendez-vous de l’histoire. Elle a ainsi résisté aux guerres, aux défaites et aux occupations pour toujours se relever et rayonner de nouveau. À l’heure où la crise sanitaire a profondément bouleversé l’équilibre du monde et nos certitudes, nous avons besoin de nouveaux réformateurs comme l’était Napoléon Bonaparte pour permettre à la France de basculer dans une nouvelle ère. En ce sens, le Code civil a permis de jeter les bases de la France moderne, tout comme nombre de réalisations qui demeurent encore aujourd’hui (préfets, lycées, Banque de France, Légion d’honneur…). Napoléon était aussi un grand bâtisseur, capable de repousser les limites du possible par son action, comme l’illustre l’Arc de Triomphe. La méthode napoléonienne montre que nous devons ainsi penser aux réformes sur le temps long afin de créer des fondations solides et pérennes pour la France.

 

Napoléon Bonaparte, par ses qualités personnelles, devrait également être un modèle pour les responsables politiques. L’ambition réformatrice et le volontarisme politique, la méritocratie face au déterminisme et l’impératif de grandeur de la France étaient les trois principes napoléoniens. Il a démontré que le volontarisme est indispensable pour déverrouiller les blocages à l’action publique sur le plan aussi bien intérieur qu’extérieur alors que le politique semble aujourd’hui si impuissant. Ensuite, sa vie est le récit d’un homme qui ne disposait que de peu d’atouts pour être un jour appelé à diriger la France. Pourtant, par sa trajectoire, Bonaparte a détruit tous les déterminismes, grâce à sa philosophie centrée sur le mérite qui permet de combattre le fatalisme. Enfin, Napoléon a montré que l’on peut réussir une grande épopée lorsque partage une double ambition personnelle et collective de grandeur. Commémorer Napoléon, c’est encourager la prise d’initiative et montrer que notre pays aura toujours de l’estime pour ses plus grands serviteurs.

 

La France est à la croisée des chemins au moment où la crise sanitaire a marqué l’avènement de l’Asie sur l’Europe et le retard français par rapport à ses voisins. Nous pouvons prendre le risque de définitivement sortir de l’histoire en abandonnant notre ambition de grandeur. Le choix de commémorer Napoléon Bonaparte porte sur notre identité historique, mais également sur le destin que nous souhaitons tracer pour la France. Célébrons un de nos plus grands serviteurs pour adresser un message : la France éternelle, fière de son histoire, ne se mettra jamais à genoux. Elle n’accepte pas le fatalisme et est prête à se battre pour retrouver son rang.

Par William Thay, Président du Millénaire

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Crédit photo : Image Napoléon Bonaparte par Jacques-Louis David sous licence Public Domain via Wikimedia Commons

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